Analyse bilan sécurité routière – nov 2024

LIGUE CONTRE LA VIOLENCE ROUTIERE

Analyse de la mortalité routière de novembre 2024

La sécurité routière annonce une baisse de la mortalité de 6,3% ce mois-ci par rapport à novembre 2023. Il faut préciser qu’il s’agit de la baisse en France Métropolitaine, alors qu’avec la France d’Outre-mer cette baisse n’est que de 1,6%. Nous rappelons que la France a pris à Stockholm l’engagement de « réduire de moitié la mortalité en une décennie » ce qui implique une baisse de 6,7% par an pendant 10 ans. Vu la déficience de notre système de sécurité routière, aucun progrès depuis 11ans, il faudrait une baisse de la mortalité de 21 % chaque mois pour qu’il y ait moins de 1.745 tués pendant les 12 mois qui précèdent mai 2027, la fin de la décennie des mandats du Président Macron. (voir les courbes ci-dessus)

On est loin de l’objectif zéro mort et zéro blessé grave sur les routes en 2050

Zéro mort sur les routes, jusqu’à présent cette formule reste un vœu pieux. En témoignent les 3.216 tués de ces 12 derniers mois en France métropolitaine. On n’est pas là où on devrait être. La « Vision zéro » n’est devenue qu’un slogan. Une France où les accidents routiers ne feraient ni morts ni blessés graves, pour nous Ligue contre la violence routière, ce n’est pas une utopie, mais il faut s’en donner vraiment les moyens. « Vision zéro » ça veut dire qu’on veut que tout soit fait, TOUT pour qu’il n’y ait plus de morts ni de blessés graves sur les routes. Nous rappelons encore une fois que l’insécurité routière a coûté 100 milliards d’euros en 2023 et que l’OMS a écrit, à la page 16 de sa brochure pour la journée mondiale de la santé du 7 avril 2004, « L’argent placé dans l’amélioration de la sécurité routière s’est avéré un excellent investissement qui a rapporté de 9% à 22% par an. En d’autres termes, les dépenses ont été plus que compensées par les économies sur les accidents et le bilan financier net est positif. Pour des raisons purement financières, les pays peuvent donc difficilement se passer d’améliorer la sécurité routière, sans parler du fait que toute vie humaine est trop précieuse pour qu’on accepte d’en perdre inutilement ».

Alors qu’attendent nos dirigeants pour sauver des vies, épargner des souffrances et, en ces temps de déficit public record, diminuer les dépenses dues à l’insécurité routière pour boucler le budget de la France. Le combat politique pour les conditions de vie menacée des plus vulnérables financièrement est justifié et admis par tous. Mais pourquoi négliger celui pour les plus vulnérables physiquement sur la route dont la vie tout court est menacée ?

 

TOUT n’est pas fait 

La vitesse

En 2006 une équipe française de chercheurs présente le LAVIA (Limiteur s’Adaptant à la VItesse Autorisée). C’est un système qui prévient le conducteur du dépassement de la vitesse autorisée et agit sur le véhicule pour respecter cette limitation. Ce dispositif est rendu obligatoire à partir du 7 juillet 2024 mais seulement dans sa fonction d’avertisseur de dépassement de la vitesse autorisée ; sa fonction active est laissée à l’initiative du constructeur, à savoir très peu proposée. De plus le conducteur en mal d’adrénaline et voulant se libérer de cette tutelle, peut désactiver ce limiteur de vitesse à tout moment.

Le danger n’est pas supprimé !

 

Le téléphone

En 2003 l’usage d’un téléphone tenu en main par le conducteur d’un véhicule en circulation est interdit.

En 2005, une étude australienne montre un risque d’accident multiplié par 4 lorsque l’on téléphone au volant, même en utilisant un kit mains-libres.

Depuis le 1er juillet 2015, téléphoner au volant à l’aide d’oreillettes est interdit, sauf avec un système bluetooth intégré au véhicule, malgré des études affirmant qu’il est tout aussi dangereux de téléphoner avec un dispositif bluetooth qu’avec un téléphone portable classique (augmentation du temps de réaction et de la charge mentale, altération de l’attention,…). En toute connaissance de ce sur-risque, les constructeurs incorporent ce dispositif, qui n’est pas explicitement illégal, à la plupart des véhicules neufs. De ce fait ils suggèrent que l’usage du bluetooth réduit suffisamment les risques encourus. Les conducteurs, en toute bonne foi, téléphonent en conduisant avec ce système en ignorant le caractère dangereux de leur pratique.

Cependant, il existe des applications, du type « mode conduite » qui enregistrent le message et préviennent la personne qui tente un appel que le conducteur est en train de conduire. Ainsi, ce dernier peut garer sa voiture sur un stationnement autorisé et, moteur éteint, rappeler son correspondant.

Malheureusement ces applications restent confidentielles, et mal communiquées

Aujourd’hui téléphoner au volant, ce sont plus de 300 tués par an !

Le danger n’est pas supprimé !

 

La ceinture de sécurité

Le port obligatoire de la ceinture a été introduit très, très progressivement :

  • 1970 : l’installation de ceintures trois points est imposée aux constructeurs ;
  • 1973 : ceintures obligatoires à l’avant hors agglomération ;
  • 1990 : ceintures obligatoires à l’avant et à l’arrière sur tous les réseaux ;
  • 1991 : sièges auto obligatoires pour les enfants;
  • 2003 : le port de la ceinture devient obligatoire pour les chauffeurs de poids lourds et les occupants d’autocar.

Une alerte est émise quand un occupant de la voiture n’est pas attaché, ce qui n’empêche pas le conducteur de démarrer et de circuler. Il n’y a qu’une alerte, c’est tout !

En 2023, 320 personnes tuées ne portaient pas leur ceinture. Environ une par jour !

Le danger n’est pas supprimé !

 

La distance de sécurité

L’article R. 412-12 du code de la route impose au conducteur de respecter une distance de sécurité d’au moins 2 secondes avec le véhicule qui précède. D’une façon générale, cette règle est très peu respectée, notamment lors de dépassements[1], créant un danger car ils imposent au véhicule dépassé une distance réduite illégale !

Les avertisseurs de distance de sécurité avec le véhicule qui précède existent, et l’alerte est émise quand l’espacement tombe sous un seuil prédéfini. Certains disposent du freinage d’urgence. Les freins du véhicule sont actionnés automatiquement en cas de risque de collision imminent. Mais très peu de véhicules en sont équipés.

Le danger n’est pas supprimé !

 

Des radars avec « Intelligence Artificielle »

Il semble que des « super radars » soient prêts à être déployés. En plus ils reprennent le matériel existant (les tourelles) auquel est ajouté de l’IA au bout de la caméra. Si le projet de loi des finances 2025 est adopté, 46,3 millions d’euros seraient alloués à la Sécurité routière pour entretenir les radars existants et moderniser les équipements. Ces premiers radars pourraient arriver courant 2025. Ils détecteraient les excès de vitesse, mais aussi trois autres infractions : le non-respect des distances de sécurité, l’absence de ceinture de sécurité et l’utilisation du téléphone au volant. Dans ce projet de loi, Florence Guillaume, déléguée interministérielle à la Sécurité routière, promet plusieurs centaines d’appareils dotés d’un dispositif aidé par l’IA pour détecter les trois nouvelles infractions citées plus haut.

Nous regrettons que ces « super-radars » ne soient pas dotés d’outils de lutte contre la fraude. Chaque voiture qui passe serait croisée avec le fichier des véhicules assurés, mais aussi celui des véhicules volés et/ou recherchés. Cela permettrait de réduire drastiquement la pratique de la conduite sans assurance, et les vols. Dommage ! Car sans cela pas de vision zéro qui ne puisse se traduire dans la réalité.

« Dès le début du développement de l’automobile, l’industrie a décidé de détourner l’attention des législateurs de la dangerosité inhérente des voitures vers les actions de la personne au volant ». Claes Tingvall, Directeur sécurité routière Suède.

Sécurité routière au travail : les choses ne s’améliorent pas

L’assureur MMA a mené une enquête publiée en 2024[2] sur les risques routiers de la vie professionnelle. D’année en année, la réalité se répète : la route est la première cause d’accident mortel dans le cadre professionnel, la prise de conscience recule et l’importance du risque routier en entreprise est de plus en plus sous-évaluée. Aujourd’hui, 42 % des actifs jugent que les actions mises en place par leur entreprise sur la prévention des risques routiers sont inexistantes, et 35 % qu’elles sont trop rares. Moins d’un quart des actifs a suivi une formation de sensibilisation aux risques routiers : c’est peu !

27 % suggèrent l’instauration d’une charte de bonnes pratiques au volant.

François Denis, directeur général de Geotab France, spécialisé dans la gestion des flottes d’entreprises, mise sur les nouveaux outils connectés pour améliorer les choses. « Quand nous installons des caméras qui filment le conducteur, l’insécurité recule. Le système est vertueux par nature : à partir du moment où le conducteur sait que son comportement peut être observé et mesuré, il adopte spontanément une attitude plus prudente ».

Des députés européens, Marina Mesure et Anthony Smith, ont réunis les 18 et 19 novembre des acteurs travaillant sur ce sujet avec pour objectif de faire naître une directive pour rendre concrète leur ambition zéro mort au travail d’ici 2030.

[1] Voir longueur totale de dépassement : http://themasq49.free.fr/index_fichiers/Depassement.htm
[2] Voir la revue 22 : « Risque routier professionnel : hausse des comportements dangereux » MMA « Zéro Tracas » 27/05/2024

Objectif -50% de tués en 2027 vs 2017 : avec la mobilisation de tous, c’est possible !

État des lieux

 

Le bilan
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