Analyse bilan sécurité routière – déc 2024

LIGUE CONTRE LA VIOLENCE ROUTIERE

Analyse de la mortalité routière de décembre 2024

Chaque année dans le monde, 1,2 million de personnes meurent sur les routes et 50 millions sont gravement blessées. Les accidents de la route sont la cause n°1 mondiale de décès chez les enfants et les jeunes adultes (5-29 ans). Plus de la moitié des décès sur la route concernent les usagers de la route vulnérables : piétons, cyclistes, et motocyclistes.

« Les accidents de la route constituent une « pandémie silencieuse » a dit Jean Todt, envoyé spécial des Nations Unies pour la sécurité routière, le 16 janvier à Paris, lors du lancement en France de la campagne mondiale des Nations Unies « Mon Conseil Sécurité ». Cette initiative s’inscrit dans le cadre d’action pour la sécurité routière 2021-2030, visant à améliorer la sécurité routière mondiale avec un objectif : réduire de moitié le nombre de victimes de la route d’ici 2030.

La France métropolitaine est loin d’être épargnée avec 3.190 décès et 15.800 blessés graves en  2024, avec un taux de mortalité de 5,1 décès pour 100 000 habitants et sans amélioration depuis 10 ans. Ce triste résultat montre le retard de la France au regard de la Suède et du Danemark qui ont respectivement 2,2 et 2,6 décès/100.000 habitants. Pour atteindre l’objectif de moins de 1.622 tués en 2030 et une mortalité comparable à celle de ces pays nordiques il faudrait une baisse annelle de 11%. Pendant ces 50 dernières années, hormis la période du covid, une telle baisse n’a été réalisée que 3 fois (1974 avec -13,6%, 2003 avec -20,9%, et 2008 avec -11,2%). La réalisation de cet objectif est une véritable gageure que nos politiques devront enfin relever. Ce ne fut pas le cas cette dernière décennie, au contraire, obnubilés par « l’inacceptabilité sociale » ils ont poussé la complaisance à l’égard de leurs électeurs jusqu’à prendre des mesures qui portent préjudice à la sécurité routière, exemples :

  • Le 80 km/h, proposé en 2013, est mis au placard pour cause « d’inacceptabilité sociale » par le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve.
  • Le 14 juin 2015, le président Hollande inaugure le salon Vinexpo de Bordeaux après être passé par les 24 heures du Mans.
  • Le 25 novembre 2015, le vote du parlement libère la publicité sur les boissons alcooliques.
  • Le 15 janvier 2019 à Grand Bourgtheroulde, le président Macron délégitime le 80 km/h.
  • Le 29 juin 2020, par crainte de raviver des rancœurs, le président Macron rejette le 110 km/h sur les autoroutes.
  • Le 10 août 2021, « Ce n’est pas le moment d’embêter les Français », dit un conseiller de l’Elysée.
  • En 2023 la première ministre, Elisabeth Borne, autorise l’accès au permis de conduire aux jeunes de 17 ans contre l’avis unanime des experts.
  • Le 22 mars 2024, un décret met fin au retrait de points pour les « petits » excès de vitesse.
  • Le 15 avril 2024, le contrôle technique est enfin obligatoire pour les deux-roues motorisés de 50 cm³ et plus, les trois-roues, les voitures sans permis, les scooters et les quads. Il aura fallu douze ans et de nombreux recours pour faire appliquer en France cette directive européenne de 2012, déjà mise en place presque partout sur le continent. Sous la pression du lobby motard qui rejette ce contrôle technique, les gouvernements ont fait trainer les choses en longueur pour échapper à cette obligation.
  • Depuis 2005, la circulation des motos entre les files est sur la table du gouvernement. Après 11 années de temporisation, en 2016 cette pratique a été autorisée à titre expérimental sur quelques territoires. À compter du 11 janvier 2025, la circulation en inter-files peut être pratiquée partout en France. Ainsi après 20 années de dérobades, les ministres ont enfin cédé au lobby motard.
  • Le 22 janvier 2025, la démagogie encore lorsque le président de la République donne raison sur Tiktok à un influenceur qui s’offusquait que la loi lui interdise de payer son péage d’autoroute avec son téléphone portable. « Donc j’ai passé le dossier au ministre de l’Intérieur et on va collectivement régler ça« , poursuit le président.

Est-ce vraiment au président de trancher la question de savoir comment on peut payer l’autoroute ? Il a mieux à faire, à commencer par exiger une feuille de route avec des actions concrètes permettant d’atteindre l’objectif auquel s’est engagé la France « zéro tué et zéro blessé grave en 2050 »

Cette liste n’est pas exhaustive, tous ces faits démontrent la gouvernance démagogique des présidences Hollande et Macron, c’est une des causes de la stagnation de la mortalité (En métropole 3.268 tués en 2013 et 3.190 en 2024).

L’alcool est un facteur présent dans 30% des accidents mortels

« Ces dernières années, les trois-quarts des accidents mortels du 1er janvier avaient un facteur alcool » déplore la déléguée interministérielle à la Sécurité routière, Florence Guillaume le 31-12-2024 sur Franceinfo « Les Français sont très conscients aujourd’hui des dangers de prendre la route en étant alcoolisés, mais pour autant, il y a une forme de déni sur le 31 décembre, où on a tendance à s’autoriser un peu….Il y a une vraie vigilance individuelle et collective à avoir. On ne laisse pas partir quelqu’un qui a trop bu et on ne pousse pas non plus quelqu’un à boire, c’est ça la bienveillance mutuelle. » Cet appel à la vigilance mutuelle « Quand on tient à quelqu’un, on le retient », relève davantage de l’incantation pieuse ou aveugle, que d’une politique digne de ce nom. En 2023, l’alcool au volant c’étaient 944 personnes tuées et 112.648 délits constatés par la police. Le traitement de ce fléau ne relève pas du slogan humanitaire mais mérite une véritable remédiation telle l’éthylotest-antidémarrage.

Les EAD ont été introduits aux USA en 1986. En 1998, la Suède a voté un texte les autorisant. En Haute-Savoie entre 2004 et 2011, le Dr Mercier-Guyon a piloté une expérimentation avec des éthylotests antidémarrage dans le cadre de peines alternatives aux poursuites judiciaires pour alcoolisation délictuelle au volant (plus de 0,8 g/l de sang). Il a mesuré l’efficacité de cette sanction avec de très bons résultats, et en conclut « On devrait tous s’équiper. Quand on sort le soir, même si l’on a prévu de ne pas conduire, une fois ivre, les bonnes résolutions sont oubliées ».

Il y a encore loin de la coupe aux lèvres

Depuis le 1er janvier 2010, l’EAD est obligatoire dans les cars transportant des enfants et à partir du 1er septembre 2015 dans les autocars affectés au transport de personnes. Par contre seul un pré-équipement est imposé dans les automobiles neuves à compter du 7 juillet 2024 pour pouvoir en installer plus facilement en cas de condamnation du conducteur.

Nous regrettons que l’EAD imposé aux conducteurs délictueux par le préfet (article R.224-6 code de la route) comme alternative à la suspension du permis de conduire ainsi que par décision judiciaire (articles L 234-2 et R 234-13 du code pénal) soit très peu utilisé.

Certains conducteurs souffrent d’une véritable addiction, un PV ne change rien. Pour ces derniers, nous attendons toujours la mise en œuvre de la mesure 11 du Comité Interministériel de Sécurité Routière (CISR) du 9 janvier 2018 : « Rendre obligatoire la pose d’un éthylotest anti démarrage (EAD) avec suivi médico psychologique en cas de récidive d’infraction de conduite en état alcoolique. »

« Vision zéro victime » implique « zéro impunité » donc l’EAD pour tous

Enfin ce serait une excellente nouvelle que la Délégation à la Sécurité Routière, dans le cadre de son engagement « vision zéro », mette en œuvre l’éthylotest antidémarrage pour tous.

 

Bilan de la sécurité routière en métropole

Depuis mai 2017, la première élection du Président Macron

  • 24.000 personnes ont été tuées, et 126.000 autres blessées grièvement.
  • Si la France avait tenu son engagement (baisse de 6,7% par an), plus de 3.700 personnes auraient été sauvées et des blessures graves auraient été évitées à près de 18.900 autres.
  • Une baisse moyenne annuelle de seulement 1,2%, on est très loin de l’engagement de la France qui est de fait de -6,7% par an !

De l’année 2024

  • 3.190 personnes tuées, soit +0,7% par rapport à 2023……3268 en 2013 !
  • 800 blessés graves, soit une baisse de 0,9% par rapport à 2023
  • 100 milliards d’euros de coût porté par la collectivité, par opposition aux 166,6 milliards d’euros du déficit public de la France en 2024.

Changer de paradigme

Toujours aucun progrès, et cependant François-Noël Buffet, ministre auprès de celui de l’Intérieur Bruno Retailleau, note qu’en restant sous la barre des 3 200 tués dans l’Hexagone, les résultats « sont encourageants »  mais qu’il « est de notre responsabilité collective d’agir pour réduire ces drames humains ». « Nous devons tous, conducteurs, cyclistes, piétons et usagers de trottinettes, adopter un comportement responsable, respecter les règles de sécurité », est-il cité dans le communiqué. Comment ose t’il qualifier d’encourageante cette hausse de 0,7% du nombre de personnes tuées alors que c’est une diminution d’au moins 21% qu’il aurait dû commenter pour que l’Etat français respecte son engagement ? Oserait-il utiliser ce terme en s’adressant à des victimes en direct ? Cet avocat, même après 20 ans de sénateur ignore que la France a signé les déclarations européennes de La Valette en 2017 et de Stockholm en 2020. Ainsi, elle s’est engagée à long terme dans la « vision zéro » qui se construit sur une responsabilité partagée entre les intervenants du réseau routier et confie aux concepteurs la plus grande des responsabilités : assurer sans cesse la sûreté des routes urbaines et rurales. Cette approche accepte que les usagers commettent des erreurs.

Monsieur le ministre, il vous faudra changer de paradigme : ce n’est plus à l’être humain de s’adapter au trafic routier, mais c’est au trafic routier de s’adapter à lui. Cela implique que les routes et les véhicules doivent être adaptés pour que l’usager de la route ne soit pas en situation, malgré les erreurs qu’il peut commettre (droit à l’erreur), d’être en danger et d’avoir un accident.

Objectif -50% de tués en 2027 vs 2017 : avec la mobilisation de tous, c’est possible !

État des lieux

 

Le bilan
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