Analyse bilan de sécurité routière mai 2022

Les chiffres de mai sont enfin publiés : c’est une hausse inquiétante !

En novembre 2012, le ministre de l’Intérieur a repris l’objectif fixé par l’Union européenne de diviser par deux la mortalité routière entre 2010 et 2020. Pour la prochaine décennie, 2021-2030, la Commission européenne maintient cet objectif de réduire de 50% le nombre de décès, mais aussi celui de personnes gravement blessées. La mortalité pendant le double quinquennat du président Macron devrait passer de 3.448 tués en 2017 à 1.724 en 2027, soit une baisse moyenne annuelle de 6,7%. Mais compte tenu du catastrophique premier quinquennat (-1,9% par an), pour atteindre ce but il faudrait une baisse moyenne annuelle de 11,8%  pendant ce second mandat. C’est mal parti !

Encore une fois, la France ne respectera pas ses engagements.

Le permis à points

Près des 2/3 des Français (environ 40 millions), possèdent ce fameux permis à points, soit un potentiel de 500 millions de points. En 2020 :

  • 11 440 727 points ont été retirés, soit 2,3 %,
  • 46 390 permis ont été invalidés pour défaut de points, soit 0,1 % ; les hommes représentent 85,7% des titulaires de ces permis invalidés,
  • 8 conducteurs sur 10 ont toujours 12 points sur leur permis, mais seule la moitié des auteurs d’accidents mortels disposaient de ces 12 points,
  • seules 84 personnes ont vu leur permis de conduire invalidé pour le seul motif d’excès de vitesse de moins de 20 km/h (1 point),
  • 4 millions de conducteurs ont vu le rétablissement de leur capital initial de 12 points après 2 ou 3 ans sans nouvelle infraction,
  • 4,7 millions de conducteurs ont récupéré un point au terme de 6 mois sans nouvelle infraction.

Depuis 30 ans, le permis à points est sporadiquement attaqué et édulcoré

Le 1er juillet 1992 le  permis à points est entré en vigueur. Immédiatement les professionnels de la route, en particulier les organisations patronales et ouvrières des routiers, entravent la circulation sur toute la France. Des blindés sont même envoyés pour déloger certains poids lourds. Initialement, il était prévu que le permis ne soit doté que de six points. Cependant face à l’impopularité de la mesure et au blocage du pays par « Tarzan » et ses compagnons, chauffeurs routiers, le permis passe de six à douze points. Au cours de cette lutte, les organisations ouvrières ont saisi l’opportunité de cette nouvelle réglementation pour faire avancer leurs conditions de travail.

En 2011, par obscurantisme, mauvaise foi et démagogie, le parlement réduit les délais de récupération de points :

  • pour une infraction donnant lieu au retrait d’un point (excès de vitesse inférieurs à 20 km/h par rapport à la vitesse autorisée ou chevauchements d’une ligne continue), il passe de 1 an à 6 mois.
  • pour une contravention appartenant aux trois premières classes, il passe de 3 ans à 2 ans,
  • pour le délit ou une contravention de quatrième et cinquième classe ce délai est porté à 3 ans,
  • pour la reconstitution des 12 points, il passe de 3 ans à 2 ans
  • entre 2 stages, pour récupérer des points, il passe de 2 ans à 1 an

Par ailleurs, dans la foulée, le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, pour satisfaire les quelques fabricants d’avertisseurs de radar, décrète qu’il ne fallait plus parler d’avertisseurs de radars, mais d’avertisseurs de zone de danger. Ce détournement sémantique autorise de fait les conducteurs à continuer de signaler les radars à leur communauté.

Ainsi tous ces « assouplissements » ont fortement contribué à la dégradation de la sécurité routière que nous avons connue quelques années plus tard et, aujourd’hui, nous en subissons toujours les conséquences.

« On va beaucoup moins taper sur les petits excès de vitesse »

Dernière attaque, une réflexion est en cours au sein du ministère de l’Intérieur afin de ne plus retirer de points sur le permis de conduire des automobilistes coupables de « petits excès de vitesse ». L’annonce de cette réflexion réclamée par le lobby « vroum-vroum » intervient à moins trois de semaines des législatives  « On va beaucoup moins taper sur les petits excès de vitesse, moins de 5 km/h » a indiqué une source au ministère de l’Intérieur.

Notre présidente, Chantal Perrichon estime qu’il faut être « d’une ignorance crasse et hallucinante pour proposer cela ». « C’est en luttant contre les petits excès de vitesse qu’il y aura une baisse de la mortalité », a-t-elle réagi. Tous les experts au niveau international conviennent que « 1% de vitesse moyenne en moins, c’est 4% de tués en moins ». Cette relation traduit le fait qu’une faible variation de vitesse implique une variation significative du risque d’accidents mortels. D’où l’intérêt d’agir sur les excès de vitesse y compris les « petits » excès de vitesse (13% des accidents mortels sont liés à un excès de vitesse inférieur à 10 km/h au-dessus de la vitesse autorisée – étude Vivian Viallon et Bernard Laumon, chercheurs à l’Ifsttar).

L’Ouest-France du 3 juin relate l’entretien, intitulé « Ma nouvelle méthode », qu’il a eu avec le président, Emmanuel Macron. On y trouve la question : « Darmanin laisse entendre que les excès de vitesse de moins de 5 km/h pourraient ne plus donner lieu à retrait de points. Vous confirmez ? ». Le président a répondu « Un travail est en cours. Cette philosophie qui consiste à garder notre exigence en matière de sécurité routière et avoir du bon sens est une bonne philosophie. »

 

Ce tableau montre que cette « tolérance électorale » serait une incitation à rouler plus vite, exemple : sur les autoroutes limitées à 130 km/h, seuls les conducteurs flashés à plus de 150 km/h par les voitures-radar seraient sanctionnés par un retrait de points.

Le président ancien, Macron 1, a permis de passer du 80 km/h au 90 km/h.

Le président nouveau, Macron 2, à nouveau sous le sceau du « bon sens », envisage d’augmenter les vitesses minimales réelles contraventionnelles.

Monsieur le Président, nous ne voyons pas en quoi cette incitation à rouler plus vite, donc augmenter l’accidentalité et la pollution, est une bonne « philosophie ».

Objectif -50% de tués en 2027 vs 2017 : avec la mobilisation de tous, c’est possible !

État des lieux

 

Le bilan
Haut de page