Analyse bilan de sécurité routière janvier 2020

 

C’est un phénomène qui est très connu, les conducteurs anticipent toujours les nouvelles décisions :
– La mortalité augmentait avant chaque élection présidentielle. En effet chaque nouveau président graciait les contrevenants pour les infractions routières. Il a fallu attendre 2002 pour mettre fin à cette pratique.
– Le 18 décembre 2002, le CNSR annonce la mise en place des radars. La mortalité baisse de 33% en janvier 2003, de 36% en février, de 25% en mars, etc . Or, les premiers radars n’ont été mis en place qu’à la fin de 2003.

Cette brutale remontée de la mortalité de janvier est liée aux annonces faites par certains présidents de département qui fanfaronnent haut et fort leur décision de revenir aux 90 km/h sur les plus « belles » routes ayant le plus fort trafic.

Toutes les études d’accidentalité montrent que quel que soit le département, ce réseau dit « principal » enregistre un nombre de personnes tuées très supérieur à sa part de réseau (exprimée en kilomètres). Contrairement aux autres routes dont la sinuosité et l’étroitesse ont un rôle modérateur de la vitesse, la sensation de confort ressentie par les conducteurs sur ce réseau principal diminue la perception du risque et ainsi encourage la pratique de vitesses élevées.

Fort trafic et faible perception du risque sont ainsi les deux raisons pour lesquelles on déplore plus d’accidents mortels sur ce réseau principal.

Le 15 janvier dernier, le ministre de l’Intérieur publie une circulaire 1 dont l’objet est de préciser les éléments essentiels à considérer afin de limiter les conséquences négatives de la remontée des vitesses à 90 sur certains tronçons :

– il rappelle que la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) permet aux présidents des départements de revenir aux 90 après avoir pris l’avis (qui reste consultatif) de la commission départementale de sécurité routière qui est composée de représentants des services de l’État, des représentants des élus départementaux et communaux, des représentants d’associations d’usagers et présidée par le préfet ;

– il rappelle que sauf urgence, les membres de la commission reçoivent, cinq jours 2 au moins avant la date de la réunion, une convocation comportant l’ordre du jour et, le cas échéant, les documents nécessaires à l’examen des affaires qui y sont inscrites ;

– il rappelle les points sur lesquels les services de l’ État doivent se fonder pour émettre leur avis pour limiter au maximum l’augmentation de risque d’accident corporel nécessairement lié à l’augmentation de la vitesse maximale autorisée. Les sections de route doivent, dans leur état existant, remplir les conditions cumulatives suivantes :

pour assurer une bonne compréhension de la route pour l’usager, les tronçons feront au moins 10 km ;

– limiter les risques de choc frontal : interdiction de dépasser sur la totalité de la section de route concernée, avec matérialisation par simple ou double ligne continue 3 ;

– limiter les risques de choc par un véhicule en intersection : absence d’intersections le long de la section de route concernée, ou interdiction de « tournez à gauche, ou aménagement des intersections considéré comme plus sécuritaire : par exemple intersections dénivelées, giratoires ;

– limiter les risques de perte de contrôle : présence d’accotements revêtus (zone de récupération), présence de dispositifs d’alerte sonore sur la chaussée;

– limiter les risques de choc contre un obstacle lors d’une perte de contrôle : obstacles latéraux supprimés ou protégés.

Par ailleurs, il précise ;
– que les critères suivants, qui présenteraient un risque fort d’aggravation de l’accidentalité en cas de relèvement de la limitation de vitesse, ne sont pas compatibles avec une dérogation au 80 km/h :
– un trafic poids lourd élevé (plus de 150 véhicules/jour) ;
– une V85 4 poids lourd supérieure à 80 km/h ;
– une V85 véhicule léger supérieure à 90 km/h ;
– que les mobilités douces ou lentes doivent être préservées. La présence des éléments suivants sur le tronçon n’est pas compatible avec une dérogation au 80 km/h :
– arrêts de transport en commun ;
– traversée.de chemins.de grande randonnée ou de véloroutes ;
– riverains ;
– engins agricoles.

Nous regrettons que des représentants de l’État au sein de ces commissions n’aient pas tenu compte des recommandations du ministre de l’Intérieur pour émettre des avis favorables à cet « assouplissement » des limitations à 80km/h malgré des trafics élevés, des vitesses pratiquées supérieures aux vitesses autorisées et l’état des infrastructures non compatibles avec cette dérogation.


1 http://circulaires.legifrance.gouv.fr/pdf/2020/01/cir_44908.pdf

2 Nous aimerions que ces documents soient rendus publics 10 jours avant la réunion pour permettre une analyse technique plus complète.

3 À défaut d’une séparation physique, l’interdiction de dépassement peut être matérialisée par un double marquage horizontal continu avec alerte sonore. Le double marquage horizontal continu offre aux usagers la possibilité d’identifier simplement les tronçons à VMA dérogatoire et l’alerte sonore contribue à la prévention des sorties de
voies. Toutefois cette solution n’empêche pas physiquement les comportements infractionnistes délibérés.

4 La vitesse V85 définit la vitesse en dessous de laquelle circulent 85 % des véhicules libres (non contraints par la circulation des autres véhicules).

État des lieux

Objectif -50% de tués en 2027 vs 2017 :

Avec la mobilisation de tous, c’est possible !

Le bilan
Haut de page