Analyse bilan sécurité routière – mars 25

LIGUE CONTRE LA VIOLENCE ROUTIERE

Analyse de la mortalité routière de mars 2025

Le critère à prendre en compte pour évaluer les progrès est le nombre de victimes sur 12 mois comparé à celui des 12 mois précédents

« Poursuivons et amplifions cette dynamique encourageante » écrit la Sécurité Routière dans son communiqué de presse du 11 avril 2025. Nous modérons cet enthousiasme en soulignant l’augmentation de 8% du nombre de blessés graves et en rappelant que pour réaliser l’objectif de la France « réduire de moitié le nombre de décès et de blessures graves en 10 ans » c’est-à-dire moins de 1.745 tués et 8.740 blessés graves  en 2027 à la fin de la présidence d’Emmanuel Macron, il faudrait une baisse moyenne annuelle de 23%. Avec seulement -5% pendant ces 12 derniers mois on en est loin. Le fait de ne pas tenir l’objectif depuis 2017 : ce sont 4.000 vies qui n’auront pas été sauvées et 20.000 blessés graves qui n’auront pas été épargnés. En reprenant l’estimation faite par l’Université Gustave Eiffel de la valeur unitaire d’un tué à 6.441 k€ et d’un blessé grave à 999 k€ (page 19 du bilan de l’accidentalité 2023), ce manquement coûte à la société, en plus des vies perdues et des souffrances, près de 46 Md€ à la société. La Ligue alerte en vain depuis des années les gouvernements qui cherchent tous à faire des économies sans augmentation d’impôts pour le budget de l’année prochaine.

Les conducteurs séniors sont des conducteurs ordinaires plus prudents, mais plus fragiles

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit statistiquement les plus de 60 ans comme seniors. Néanmoins, le corps médical préfère employer ce terme à partir de 70 ans, puisque 73 ans est l’âge moyen observé du premier accident de santé sérieux. Compte tenu du vieillissement général de la population, la proportion des séniors augmente, de 10,6 millions en 2010, ils seront 22 millions en 2050.

Une enquête IPSOS menée en février 2025 pour la « Fondation VINCI Autoroutes », nous apprend que 93 % des seniors conduisent et estiment que la conduite leur est indispensable.

Toutefois 58% conduisent moins qu’auparavant, 81 % roulent moins vite et font plus de pauses lors des longs trajets, 78% conduisent moins de nuit.

Le vieillissement lui-même entraîne généralement un déclin progressif de la force, de la coordination, du temps de réaction, de la vision et de l’audition. Les personnes âgées ont moins d’endurance et se fatiguent plus rapidement. Elles sont moins capables de se concentrer sur plus d’une tâche en même temps. Cependant, la plupart des changements attribués au vieillissement sont modestes et, bien souvent, ils ne sont qu’une cause mineure des problèmes de sécurité dans la conduite automobile. Les statistiques montrent que les personnes âgées sont moins impliquées dans des accidents que les jeunes conducteurs. Les seniors réduisent spontanément la vitesse, choisissent des trajets qu’ils connaissent, adoptent une conduite pacifiée. Les réflexes se font certes moins vifs mais cette détérioration commence dès 35 ans, et elle est largement compensée par l’expérience acquise. La gravité des accidents dans lesquels ils sont impliqués est souvent plus importante. Cette vulnérabilité accrue aux blessures observée chez les conducteurs plus âgés est due à une fragilité physique et à la présence d’un ou de plusieurs troubles médicaux, tels que l’ostéoporose ou une maladie cardiaque.

En 2023, le nombre de personnes tuées sur la route était de 91 par million d’habitants pour les 18-24 ans et de 74 pour les 75 ans et plus. Par contre les conducteurs de 18 à 24 ans sont plus souvent responsables que les plus de 85 ans. « Le cœur de cible de la prévention, ce doit être les 18- 24 ans ». a dit Geneviève Jurgensen, porte-parole de la Ligue contre la violence routière, en décembre 2002.

Le « bon sens » est la chose du monde la mieux partagée 

À intervalles réguliers, l’actualité, sous couvert « du bon sens », amène les pouvoirs publics à penser qu’il y a un problème sénior sur les routes. Depuis le début du développement de l’automobile, l’industrie détourne l’attention des législateurs de la dangerosité inhérente du système routier vers les actions de la personne au volant. Cette orientation incite les décideurs à repenser la réglementation du permis de conduire pour les personnes âgées. Un sujet délicat, tant il touche à des questions sensibles telles que la stigmatisation des personnes âgées, l’autonomie individuelle et la sécurité routière. La question de la conduite des seniors, avec toutes leurs « imperfections » dans notre système de transport routier déficient, suscite régulièrement débats et controverses. Nous rappelons que l’étude FLAM de 2021 (facteurs liés aux accidents mortels) précise que les facteurs liés à l’infrastructure sont contributifs dans 30% des accidents. Si le permis de conduire est un droit fondamental, son encadrement chez les personnes âgées pose de nombreuses questions, entre crainte de discriminations liées à l’âge sans prise en compte des capacités individuelles et nécessité de mesures pour contraindre les séniors à modifier leur comportement. Le débat porte donc sur la nécessité de trouver un équilibre entre sécurité collective et libertés individuelles, sans tomber dans une stigmatisation des conducteurs âgés.

Le contrôle du permis de conduire des seniors représente un défi majeur pour les autorités, qui doivent concilier sécurité routière et préservation de l’autonomie des personnes âgées. Les mesures qui seront adoptées devront trouver un équilibre entre ces deux impératifs, tout en évitant toute forme de discrimination basée uniquement sur l’âge. L’approche qui semble se dessiner, et que la Ligue soutient, privilégie une évaluation individualisée des capacités dont il convient de redire, contrairement à ce que propage la désinformation, qu’elle ne débouche pas systématiquement sur une interdiction de conduire. Les solutions d’accompagnement individualisé pour permettre une conduite responsable sur le long terme doivent être considérées en parallèle.

Une approche systémique

L’accident est multifactoriel, parmi tous les facteurs qui contribuent à sa réalisation, il suffit qu’un d’entre eux ne se produise pas pour que cet accident n’ait pas lieu, c’est pourquoi les constructeurs d’automobiles, les gestionnaires de voiries, les décideurs publics ne doivent plus considérer l’individu comme étant le seul risque à l’origine de l’accident. Ils doivent adapter les voies de circulation, la signalisation, l’ergonomie des véhicules, etc., aux capacités des populations y compris des personnes âgées. Cette démarche sera bénéfique à tous.

Objectif -50% de tués en 2027 vs 2017 : avec la mobilisation de tous, c’est possible !

État des lieux

 

Le bilan
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