Objectif -50% de tués en 2027 vs 2017 : avec la mobilisation de tous, c’est possible !
État des lieux
L’Union européenne a fixé comme objectif : « diviser par deux la mortalité routière dans une décennie. »
Pendant la décennie des mandats des présidents Chirac et Sarkozy (mai 2002 – mai 2012), la mortalité routière a diminué de 54%.
Pendant la décennie des mandats des présidents Hollande et Macron (mai 2012 – mai 2022) la mortalité a diminué de 14%.
L’objectif européen, que la France a signé, est donc réalisable. Mais encore faut-il qu’il y ait un engagement présidentiel officiel et solennel comme celui de 2002 : mise en œuvre des radars, fin des amnisties présidentielles, fin des indulgences vis-à-vis des PV, etc. Ce qui n’est pas, tant s’en faut. Pour atteindre cet objectif pendant la décennie du président Macron, il faudrait (hors Covid) jusqu’en 2027 une baisse moyenne annuelle de 13,4% !
La France est parmi les pays qui ont le moins de radars!
L’effet des radars sur la baisse de l’accidentalité n’est plus à démontrer : 7655 tués en 2002, 3268 en 2013, soit une baisse moyenne de 7,4% par an. Les radars sauvent des vies : en 10 ans, entre 2003 et 2012, les radars ont permis de sauver 23 000 vies.
Au 1er septembre 2022, le parc de 4 447 appareils radars comprend 2 523 radars fixes de vitesse (dont 1098 tourelles), 611 radars fixes de feu rouge ou passage à niveau, 472 voitures-radars (conduites par les forces de l’ordre ou externalisées), 501 radars « débarquables » et 340 radars déplaçables de type radars « chantier ». C’est une chose d’avoir beaucoup de radars, mais pour comparer utilement les situations il faut comparer leur densité au nombre de kilomètres de routes de chaque pays. L’Italie occupe la première marche du podium, avec environ 22 radars pour 1.000 kilomètres de route. Les radars sont également très répandus en Belgique et au Royaume-Uni, où le ratio atteint 19 unités pour 1.000 km. La France métropolitaine affiche une densité de radars beaucoup plus faible comparée à la plupart de ses voisins :3,4 pour 1 000 km.
Recettes des radars
En 2021, les radars ont rapporté 859 millions d’euros. C’est une somme 4 fois inférieure à l’effort financier de l’État en faveur de la sécurité routière (3,7 milliards d’euros par an). Le coût total de l’insécurité routière (valeurs Quinet) est de 46,3 Md€, soit 1,9 % du PIB. En 2023, les radars devraient rapporter 955 millions d’euros. Soit la deuxième meilleure recette pour les radars automatiques depuis leur mise en service en 2003, juste derrière le record enregistré en 2017 à 1,013 milliard d’euros.
En 2023 le parc de radars automatiques va continuer à grossir, à se moderniser et les voitures radars
privatisées vont finir d’être déployées dans les régions encore épargnées à ce jour, à savoir Provence-Alpes-
Côte d’Azur, Auvergne-Rhône-Alpes, Île-de-France, Occitanie.
Les recettes-amendes radars de 2021 ont été réparties
dans le budget de l’État :
-99 millions d’euros pour le désendettement de l’État,
-273 millions d’euros pour l’agence de financement
des infrastructures de transports de France (AFIT
France),
-145 millions d’euros pour les collectivités territoriales,
-316 millions d’euros pour la Délégation à la sécurité
routière (DSR),
-26 millions d’euros pour le fonds de modernisation
pour l’investissement en santé (FMIS) (anciennement
fonds de modernisation des établissements de santé
publics et privés –FMESPP).
La justice tranche pour un retour à 80, mais permet de maintenir le 90 !
En 2020 la Ligue a déposé 12 recours aux tribunaux administratifs contre des départements qui ont rétabli le 90 km/h. Jusqu’alors 4 tribunaux n’ont pas encore statué, 3 ont rejeté le recours et 5 ont donné raison à la Ligue, ils estiment que les arrêtés de ces départements relevant la vitesse maximale à 90 km/h sont illégaux, au motif qu’ils sont juridiquement insuffisamment motivés. Ils ne contiennent aucun motif lié à l’accidentalité des sections de routes concernées. Cependant ces départements considèrent que les caractéristiques techniques, en particulier la géométrie et les équipements de sécurité, sont compatibles avec ce relèvement. Mais les tribunaux précisent qu’exceptionnellement l’annulation est décalée de 3 mois pour laisser le temps au département de concocter de nouveaux arrêtés pour maintenir la vitesse à 90 km/h. « C’est un déni de justice, s’emporte Philippe Vayssette, président de la Ligue du Calvados, ils tablent sur le fait que les procédures sont longues et qu’on ne pourra rien empêcher. On va voir comment on peut pallier ça. Parce que relever la vitesse, c’est augmenter l’insécurité routière, c’est une augmentation de la consommation de carburant, c’est davantage de pollution. C’est quand même un drôle de signal qui est envoyé ». Pour Jean-Yves Lamant, vice-président de la fédération de la Ligue, « le débat ne doit pas se situer sur la forme, mais sur le fond. Le passage de la limite de 80 à 90 km/h devrait augmenter le nombre de tués sur les routes ».
La vitesse tue
Plus la vitesse est élevée, plus il y a d’accidents et plus ils sont graves. Les faits sont là. Toutes les études le montrent. C’est scientifiquement établi et connu de tous les ingénieurs des routes, sauf ceux qui, par soumission à leur hiérarchie politique, renient les lois scientifiques pour argumenter faussement de telles contrevérités au service de cette démagogie ambiante.
Trois députés de l’Aude demandent le retour des 90 km/h
Les trois députés Rassemblement National du département de l’Aude, Christophe Barthès, Frédéric Falcon et Julien Rancoule, écrivent à la présidente du département, Hélène Sandragné, pour demander le retour aux 90 km/h « cette limitation de vitesse, imposée de façon arbitraire et sans concertation, est une attaque de la ruralité où la voiture reste l’unique moyen de transport (…) nous croyons en la responsabilité individuelle de nos concitoyens et pensons qu’il devient urgent de mettre fin à cette mesure avant que de nouveaux mouvements protestataires ne se réveillent dans la ruralité. Nous, députés de l’Aude, vous demandons solennellement de mettre en œuvre les mesures permettant le retour des 90 km/h sur le réseau secondaire départemental ».
Dans sa réponse, la présidente, qui pense que ce retour en arrière n’est pas une décision pertinente à prendre ni en termes de sécurité routière, ni en matière de consommations énergétiques, précise aux trois élus à l’Assemblée Nationale : « La première cause de mortalité dans les accidents routiers est une vitesse excessive (31%). Or en roulant à 80 km/h au lieu de 90 km/h la diminution de ce risque est certaine (…) En contrepoint, le gain de temps en augmentant la vitesse à 90 km/h n’est que de 5 secondes par kilomètre, ce qui représente un gain de 2 minutes et 30 secondes sur un trajet moyen de 30 km ». Elle ajoute : « Par ailleurs, alors que nos concitoyens subissent une augmentation incessante du prix du carburant et que notre planète souffre de rejets exorbitants de gaz à effet de serre, il ne me semble pas nécessaire qu’accroître la consommation des véhicules en les autorisant à aller plus vite, soit une décision des plus opportunes ». C’est donc un « non » au retour des 90 km/h sur les routes secondaires du département de l’Aude. Quant à la défense de la ruralité, Hélène Sandragné déclare : « Tout autant que l’attachement à la responsabilité individuelle et à la liberté individuelle, la défense de la ruralité mérite mieux que ce débat »
Nous n’aurions pas écrit mieux pour défendre le 80km/h !
Pour s’attirer les faveurs des conducteurs, le Rassemblement National multiplie les propositions de lois
Le député de Moselle, Laurent Jacobelli, s’apprête à s’attaquer à « l’excès de radars ».
La députée de la Marne, Anne-Sophie Frigout, a déposé un projet de loi visant à supprimer les zones à faibles émissions (ZFE). Elle revendique haut et fort le parrainage de l’association « 40 Millions d’automobilistes » qui l’a aidé à rédiger ce projet. « C’est la première fois que le RN est soutenu par une association », se gargarise-t‑elle. Avec la fin de la ristourne sur le carburant au 1er janvier et la forte inflation, le sujet peut devenir inflammable.
Le 12 janvier, jour de sa niche parlementaire1, le groupe RN fixera l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale dans lequel il glissera ces sujets sulfureux avec l’espoir d’un retour des Gilets jaunes. L’argument de la « pompe à fric » fera certainement partie des grosses ficelles utilisées par les lobbies « pro-vitesse » laissant à penser que toute sanction n’aurait qu’un objectif pécuniaire alors que l’on sait parfaitement qu’une politique de sécurité routière ne peut s’affranchir d’un dispositif de contrôle sanction. Par ailleurs, on peut s’attendre à ce que des députés saisissent l’opportunité de proposer l’absolution aux coupables de « petits excès de vitesse » revendiquée par les associations de l’insécurité routière et à laquelle le ministre de l’Intérieur « réfléchit » depuis plusieurs mois (voir ci-dessous notre commentaire de septembre 2022)2.
Compte tenu de l’expérience de notre Déléguée à la sécurité routière qui, comme gendarme, a connu beaucoup de drames de la route, nous savons qu’elle trouvera les arguments pour convaincre le ministre de contrecarrer ces discours populistes, en particulier lors des débats à l’Assemblée Nationale.
1 Séance mensuelle réservée à un groupe parlementaire au Sénat et à l’Assemblée nationale, pendant laquelle les sénateurs ou députés de ce groupe sont maîtres de l’ordre du jour et peuvent déposer des propositions de loi.
2 « Ils (les petits excès de vitesse) sont certes dangereux mais souvent involontaires et représentent plus de 50% des points perdus (…) La réflexion se poursuit donc de ne plus retirer ces points tout en maintenant l’amende (…) Si notre réflexion va au bout, en lien avec les associations de sécurité routière, ces dispositions pourraient entrer en vigueur en 2023« , propos tenus par le ministre de l’Intérieur aux journalistes du groupe Ebra le 12 juillet 2022.
Cette tolérance électorale serait « une mesure totalement inégalitaire en faveur de ceux qui pourront payer sans problème, et nous allons surtout assister à une remontée inexorable du nombre des morts. Les experts attendent le pire en 2023« , se désole notre présidente, Chantal Perrichon.
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