État des lieux
Objectif -50% de tués en 2027 vs 2017 :
Avec la mobilisation de tous, c’est possible !
Le dépliant édité par le département de la Corrèze pour le retour à 90km/h sur les routes départementales hors agglomération est un cas d’école sur la façon dont certains décideurs politiques sont capables d’instrumentaliser la sécurité routière. Nous vous proposons un décryptage de ce document que vous trouverez, dans sa totalité en téléchargement sur le site de la Ligue (1).
L’accroche
Le titre du document « En Corrèze, à compter du 1er février 2020 sur les routes départementales hors agglomération » illustré par les deux panneaux 90km et 80KM/H par temps de pluie, a le mérite de la clarté. Le message aurait pu se résumer à celle seule information, mais le décideur prend soin d’ajouter pas moins de trois messages relevant du politiquement correct :
« Bonne route, restez prudent ! »
« La sécurité routière reste la priorité du département. »
On peut d’ailleurs s’interroger sur la seconde formule. Doit-on y voir un « …reste malgré tout la priorité du département » ? Pourquoi chercher ainsi à rassurer le concitoyen sur la volonté de veiller à sa sécurité ? Aurions-nous des raisons d’en douter ?
Parce que l’on n’est jamais trop prudent dans le domaine de la communication, un troisième message annonce :
« La mesure s’accompagnera d’un vaste plan de prévention en faveur des Corréziens. »
Que de précautions pour tenter d’avoir bonne conscience …
Dérapage incontrôlé
Leur communicant ayant fait son travail d’annonce et de sur-rassurance sur leurs bonnes intentions, il aurait pu stopper là ses efforts. C’était sans compter sur la commande politique, à peine voilée, qui se traduit par cette affirmation totalement décomplexée.
« Engagement tenu ! »
Mais la tentation était trop forte. Il y avait un engagement… L’élu avait bien entendu les manifestations d’une minorité bruyante, et qu’importe les résultats de l’expérimentation. La sécurité routière se devait donc de passer au second plan pour laisser place à un jeu politicien positionné sur le soi-disant combat d’une ruralité face au pouvoir jacobin de l’État ! Par conséquent, nous retrouvons dans le document l’évocation de cette promesse :
« Le retour aux 90km/h, une volonté départementale exprimée depuis 2 ans ».
La pitoyable mise en scène à l’occasion de la pose d’un panneau 90 km/h (cf article suivant) apporte la preuve irréfutable de cette instrumentalisation.
Quand les faits et l’expertise laissent place à la posture…
Dans le document, jamais n’est évoquée l’idée d’une quelconque efficacité de la mesure. Ce n’est pas le problème. On est contre et puis c’est tout !
Pour tenter de convaincre que le département aurait véritablement réfléchi sur cette question, il publie un classement des facteurs de risques prenant soin de bien mettre en avant les facteurs alcool et stupéfiant puis téléphone. Le message subliminal est clair : agir sur la vitesse n’est pas une priorité, attachons-nous d’abord aux autres facteurs de risques. Nous retrouvons là le raisonnement récurant du lobby « vroum-vroum ».
La proposition la plus originale du document est celle de créer, au niveau national, un réseau d’observatoires départementaux de la sécurité routière. Cet écran de fumée peut pourtant nourrir notre inquiétude. En reconnaissant qu’il aurait finalement des marges de progrès dans cette connaissance du sujet, le président du département de la Corrèze, qui se targuait, il y a quelques mois, de connaître mieux que quiconque l’accidentalité de son département découvre brusquement la nécessité de l’observation dans le domaine de la sécurité routière ? ce brusque soucis de l’expertise est en opposition avec la nécessité d’attendre le terme de l’expérimentation mise en place par l’État et ses institutions.Si cette soif d’expertise était bien sincère, alors on est en droit de se poser des questions :
Pourquoi ne pas avoir eu l’attitude responsable d’attendre le terme d’une expérimentation avant de prendre une décision ?
L’exécutif départemental a t-il eu la curiosité de consulter les 92 cartes départementales de l’accidentalité produites par notre association ?
A t-il appuyé sa réflexion sur la carte de la Corrèze, que nous lui avons transmise, et qui démontre que 54% des accidents mortels se concentrent sur 8% du linéaire de voies départementales sans séparateurs médians ?
Pour compléter cet enfumage :
Il est fait référence à « Un plan départemental de prévention et de sécurité routière concerté avec les associations » sans que l’on sache vraiment s’il s’agit ou non d’une nouveauté…
Nous apprenons aussi que la reprogrammation des radars fixes est envisagée. Volonté du département ? Lorsque l’on sait qu’il s’agit d’une prérogative de l’État, l’effort est tout relatif et ce d’autant que cette technologie est obsolète et devrait être remplacée par des contrôles effectués par des voitures banalisées.
Pour conclure, les élus départementaux qui auront pris la décision d’un retour à 90 km/h doivent savoir que l’accidentalité de leurs routes sera mise sous surveillance. Parce qu’il est question de vies perdues et de familles de victimes brisées, chacun pourra compter sur notre vigilance mais surtout sur notre détermination à pointer les responsabilités.
État des lieux
Avec la mobilisation de tous, c’est possible !